Belle idée d’avoir invité François-René Duchâble à venir planter son piano sur la falaise au milieu du vignoble des Hauts de Talmont, en surplomb de l’estuaire de la Gironde !
Le lendemain de son tabac sur la grande plage de Royan devant 50 000 spectateurs dans le cadre du festival Un Violon sur le Sable, ce moment d’intimité au coucher du soleil (près de 2 000 personnes tout de même) n’a pas déçu les aficionados de ce personnage
hors du commun.
Lui qui s’était débarrassé de son carcan de concertiste classique, envoyant valdinguer au fond d’un lac de montagne piano, carrière, queue-de-pie et parterres chics, a visiblement pris plaisir à jouer ici, en pleine nature, et à s’amuser au micro avec un public bon enfant, dans des conditions qui frisèrent parfois l’inconfort.
Finalement, ce 28 juillet 2012, ni la météo capricieuse, ni le vent tourbillonnant, ni la fraîcheur du soir tombant n’auront eu raison de ce diable d’homme, décidément plus à l’aise à l’air libre que dans un studio d’enregistrement.
Il le rappellera d’ailleurs au cours du récital : “On est dans l’éternité ici, contrairement à la radio, au concert et dans les disques, où l’on enferme la musique comme on enferme les oeuvres d’art dans des musées.”
Libre comme l’air, Duchâble le fut jusque dans le choix de son programme : au milieu de “tubes” du répertoire (impromptu de Schubert, danse hongroise de Brahms, étude Révolutionnaire de Chopin…), il osa une sonate de Beethoven hybride, “recomposée” à partir de la Waldstein, de la Pathétique et de la Clair de lune… Epoustouflant presto agitato !
François-René Duchâble aurait bien continué à enchanter son auditoire jusqu’au bout de la nuit mais, sécurité (du piano comme du public) oblige, son programme s’est arrêté avec la “paraphrase” de Liszt sur Rigoletto. Debussy et Ravel, ce sera pour une prochaine fois…
Après de chaleureux applaudissements, François-René Duchâble a repri son micro une dernière fois : “Je déteste voir les gens à la sortie d’un concert. Si je suis sympathique avec les groupes, je ne le suis pas du tout avec les individus. Donc, ne vous ruez pas sur moi tout de suite […], j’ai besoin d’un temps de silence pour digérer l’événement.”
Aucune réticence en revanche pour aller trinquer avec ses hôtes à la boutique des Hauts de Talmont. Après l’effervescence du concert, la pétillance du colombard n’est-elle pas toujours de la musique ?
Charles Vincent